Yo,
On quitte Salomon. Un autre chaman, Ameleï, va nous servir de guide. Sarhul a estimé à 10h le temps pour rejoindre l’autre village, ça comprend de la marche et notre capacité à trouver une pirogue ou de construire un radeau. Méfiance, en Indonésie tu divises le temps de marche par 2. Sauf qu’ici tu vas découvrir que t’es chez les mentawais et ça rigole pas côté rythme.

Amoleï, notre guide chaman arrive bien évidemment en pagne/kabit, son coupe-coupe et son arc et carquois de flèches empoisonnées en cas où on croiserait un singe..

Fini les conneries, t’es passé en mode chaussure de marche.
Pour faire simple, ça a été un cauchemar sans fin. De la boue tout le temps, en montée, en descente (Laure, Pascal, le Vietnam, de la rigolade en comparaison). Tu passes ton temps à glisser avec ces putains de chaussures qui accrochent que dal. Tu dois passer sur des troncs d’arbres pour franchir des obstacles et t’as pas le droit à l’erreur. Tu trimballes trop de merdier dans ton sac donc tes 85 kg plus les 15kg du sac font que les troncs sur lesquels tu marches sont pas habitués à ce poids. Le mentawai moyen doit faire 60 kg tout mouillé. Tout est agressif : t’as des lianes très longues mais d’1 mm de diamètre bourrées de piquants qui t’accrochent et te déchirent de partout, des petits insectes viennent se poser sur ton bras, t’empalent et repartent aussi tôt. Il y a 15 jours t’as du toucher une mauvaise herbe, elle te fait encore mal.
Pas la peine de parler des moustiques, parlons des sangsues. La première tu l’as choppé sur le cul, la deuxième sur les c….. No comment. Et il y en a pas eu que 2.
Tu glisses une fois de plus, tu mets la main au sol pour te rattraper. Pile sur une écorce pleines d’épines. 1 semaine après tu comptes encore les épines dans ta main.

Un cauchemar, vraiment. Le chaman marche super vite mais fait des grandes pauses clopes. Wati, celle qui veut devenir guide ne s’attendait absolument pas à çà. A la moindre sangsue, elle fait des bonds. 1/3 de son sac contient des produits de beauté. Mais très grand respect car elle a fait TOUT le trek pieds nus et l’on quasiment jamais attendu. A sa place, t’aurais déjà creusé ta tombe.

Le GPS a décidé de rendre l’âme à cause de l’humidité, tes chaussures de trek te préviennent quelles veulent être enterrées sur l’île (apparement le matériel allemand n’est pas fait pour ces conditions)

Bon, les 10h, c’est quand t’es un mentawai. Quand t’es avec un touriste ça rallonge… Donc on s’est arrêté dans la jungle et les mecs ont construit un abri à coup de machettes. En 30 minutes, c’était plié. 4-5 troncs, des feuilles de bananier pour le toit, des feuilles de palmier pour le sol et des bambous pour faire cuire le riz et les nouilles. S’ils font kolantah, ils dégoûtent tout le monde. Dîner à 17h.

Juste avant la nuit un serpent noir d’un mètre de long vient se cacher dans les broussailles à 50 cm où tu vas mettre tes pieds pour dormir. On rigole plus, faut sortir la magie. Le chaman sort de sa besace une magie très puissante, du sel ! Pas compliqué le job de chaman. Il en met autour du camp, c’est sensé faire fuir les serpents et les mauvais esprits. Mouais toi t’aurais préféré un bon coup de machette dans la gueule du serpent mais va le trouver. Et puis ce sont pas les moustiquaires roses qui vont stopper le serpent.
Au moment de te coucher tu t’apperçois que le sol n’est pas plat du tout mais bombé. T’as la tête et les pieds plus bas que le ventre donc totalement impossible de dormir. Donc entre la trouille du serpent et la bosse, t’as pas dormi.
Le lendemain, on commence à marcher dans un ruisseau et un coup de machettes du chaman, un serpent… 1h plus tard, l’autre gars allait mettre sa main sur un tronc quand un serpent est passé juste avant. Sans déconner, vu où on est, la moindre merde et, euh, c’est la cata.
On doit s’enquiller une montée sans fin et le pire c’est la descente, toujours à cause de cette boue glissante.
On arrive enfin à la rivière Badglube où on trouve une pirogue. Elle est trop petite pour nous tous. Wati, qui ne sait pas nager, part avec le chaman Amoleï et les bagages.

Les berges sont couvertes de cocotiers, de palmiers, t’as l’impression d’être le premier à passer ici. On commence à marcher dans la rivière et au fur et à mesure l’eau monte. Tu en as jusqu’à la taille et par moment t’es obligés de nager. L’eau est chaude et transparente, du soleil, le paradis en comparaison des heures précédentes. Sauf que…

Le temps change rapidement. D’abord du vent, des nuages puis le déluge. Sarhul nous stoppe car devant nous, le vent risque de faire tomber un arbre sur la rivière au moment où on passe. 15 minutes d’attente plus tard, on reprend notre marche/nage sous la pluie. On a marché plus d’une heure et on n’a pas du faire la moitié. Avec le déluge la rivière est complément marron. Le paradis s’est transformé en enfer.
Finalement, on entend le bruit d’un pongpong (pirogue à moteur). Amoleï nous envoi une pirogue.
Passons d’autres petites péripéties mais on est finalement arrivé à l’Uma du chaman Raïba, pas très loin du village de Sakudaï,
Comme t’es en bermuda, t’es déchiré et piqué de partout.
A suivre…
Ricardo la déchirure