Veille du départ pour 9 jours de rafting sur la rivière Franklin, apparemment une rivière mythique pour les australiens. Réunion de l’équipe pour un briefing. On est 8 clients, tous australiens, t’es la seule grenouille.

Il y a trois guides, deux tasmaniens Eric et Jordi et une écossaise Abigael, tous assez jeunes. Bon c’est pas compliqué, pour l’instant t’en comprends aucun quand ils causent. T’as le droit à une combinaison, un casque, un gilet de sauvetage qui sent le chien mouillé et un grand sac imperméable pour mettre tes affaires. Ils verifient le matos que t’a amené. Bien sûr, tout ce qui était demandé n’est pas utile..
Les gars nous disent qu’on peut amener de l’alcool sans problème. Du coup, t’achetes 8 litres de vin (ben ouais 11 personnes x 9 jours) et tu te dis que tu vas leur faire découvrir une spécialité française. T’as fait tous les magasins d’alcool de la ville pour trouver une bouteille de Pastis que t’as payé une blinde.
Lendemain matin, ils nous récupèrent et c’est parti pour 5h bagnole. Les rares bleds traversaient sont composés d’une seule rue avec quelques boutiques. Ca y est, t’es enfin sorti des villes. Les rares stations essences font aussi office d’épicerie, les routes sont en partie goudronnées. On passe à côté de lacs où il n’y a personne.
Arrivé au point de départ, gonflage des rafts et installation de tous le matos. Les rafts sont ras la gueule.
Briefing sur la sécurité, t’as compris que si tu tombais à la flotte tu devais mettre les pieds devant et que si tu arrivais vers un tronc d’arbre il fallait nager rapidement pour passer au dessus du tronc car si t’es emporté par l’eau en dessous du tronc t’as de grandes chances d’y rester.
Le deuxième jour le briefing de sécurité a duré deux minutes et puis plus rien les jours suivants, comme quoi la sécurité…
Il fait un grand soleil et à part les guides, ils sont tous en combinaison. T’as du rater un truc car toi t’es resté en maillot de bain.
Le niveau de l’eau est très bas et ca fait pas 5 minutes que t’es sur le raft qu’il faut descendre pour pousser. Bon ben routes les 2-3 minutes faut descendre dans la flotte et pousser. L’eau de la rivière est très sombre, presque noire, à cause d’un truc que t’as pas compris. Donc tu vois pas où tu mets tes pieds, tu glisses, tu te tapes contre les rochers. Résultat à la fin de la demi journée tes jambes sont pleines de coups. Si c’est comme ça les 9 jours ca va être galère et pas fun. Les autres avec leur combi sont protégés mais crèvent de chaud.

Pour les camps de nuit, c’est pas compliqué, il faut sortir tout le merdier des rafts puis chacun se dépêche de se trouver un coin tranquille pour s’installer. Pas de tentes, tout le monde dort à la belle étoile. Et en cas de pluie ils ont des sortes de bâches.
Alors le truc important c’est le coin toilette. Il y a des règles importantes ici. Hors de question de faire ton caca où tu veux. Ils installent dans un coin une grande boîte rouge, le ‘groover’. Tu prends un sac plastique (ceux pour ramasser les crottes des chiens), tu te le colles sous les fesses, tu fais ce que tu as à faire en espérant que tu es bonne position. Et ton petit sachet bien rempli tu le mets dans le groover. Ouais c’est vrai que t’espères être rapidement constipé.
Par contre tu peux pisser à deux mètres de la rivière, ca n’a pas d’importance, mouais…
C’est l’heure de l’apéro, les guides ont préparé plein de trucs et chaque fois il y aura du fromage en apéro, ca se fait ici. À part un mec personne n’a apporté d’alcool. Et personne veut boire, du coup ca va en faire de la picole.

Les trois guides sont des gros fêtards et ont leur propre réserve. Bon ils vont aussi largement taper dans la tienne.
Côté flotte, ils nous ont dit qu’on buvait l’eau de la rivière, que généralement une personne sur dix était malade une journée puis ca allait mieux ensuite. On verra qui est le gagnant…
Côté bouffe, tous les soirs ca a été royal, tous les soirs c’était différent. Un soir, ils ont sorti la farine, fait une pâte à pizza et c’était parti pour une soirée pizza cuite à la poêle et bien meilleure que dans une grande partie de ces pseudo trattorias parisiennes.

Pour le matin, il faisait des pancakes, du pain toasté, des supers omelettes…
Ils nous ont fait même un gâteau. Je vous ai mis la recette à la fin. Testez la. Même les baltringues du Kremlin bicetre seront capables de la faire..
Résultat, Kinnary c’est comme toi, mon bidon a poussé mais là Gabriel y est pour rien.

Côté paysage, il faut imaginer une rivière très sombre presque noire avec des reflets oranges foncés, des rochers et des gorges de couleur rouge, grise et blanche, parfois des petites plages mais surtout du vert sous toutes ses nuances.
Côté végétation t’y connais que dal mais il y avait parfois des grandes fougères très vertes qui contrastaient avec le reste des arbres et arbustes.
Très souvent sur le bord de la rivière, d’immenses troncs d’arbres. Certains sont 5-6 mètres au dessus du niveau de la rivière, ça donne une idée du niveau l’eau à certaines périodes. Il y a aucun chemin qui rejoint la rivière, c’est l’autonomie la plus complète. On à l’impression d’être seul au monde. En cas de pépin c’est l’hélico.

On a suivi un autre groupe qui faisait la même descente mais en plus du yoga. Chaque matin ils se levaient vers 5h pour leur séance de yoga. Super!!!

Je vais pas vous décrire jour par jour mais les différences sont surtout liées à la partie rafting.
Rappel, si les deux premiers jours on a passé notre temps à pousser les rafts, les jours suivants ont été pires.

Quand le matin, ils te disent qu’on va passer des rapides, en fait oui ce sont des rapides quand le niveau de l’eau est haut, dans ton cas ça veut dire du portage de raft et pas sur 5 mètres. Il y a des passages où on a mis 2 heures pour faire 100 mètres pour déplacer les 3 rafts. Il fallait installer des cordes, soulever les rafts, les tourner à 90° et les tirer entre deux rochers. Tu sens que les guides ont du muscle et ils envoient du lourd. Chacun prend sa corde, le guide crie ready one two three et tout le monde tire comme il peut. Un conseil, si vos enfants ont des muscles mais ils sont nuls en math, ils pourront toujours faire guide de rafting…

Quand tu penses à la yoga team qui a une guide qui ne peut rien porter et l’autre plutôt fine, ils ont du galérer bien plus.
Sur certains passages, il a même fallu enlever tout le matos, se servir des rafts pour faire un pont, faire passer les autres rafts et le matos puis tout remonter et ca juste quand il s’est mis à tomber des cordes. Ouais ici, quand il y a du soleil, ca te brûle et quand il pleut c’est pas la version bretonne.
Sinon ce qui est sympa c’est quand tu as un tronc qui barre la rivière, soit t’as un coup de chance t’arrives à passer dessous sinon ça veut dire qu’il faut faire passer le raft avec tout son matos par dessus. Donc t’es debout sur le tronc à tirer sur le raft en espérant ne pas glisser où que le raft t’emporte et te fasse tomber de l’autre côté.
Toi qui était venu te prendre des shoots d’adrénaline en passant des rapides que dal. Ah oui, t’étais sur le raft d’Abigael quand on a passé un petit rapide. Bon elle a tendance à les prendre plutôt de côté que de face. Le raft a fortement penché (les deux mecs lourds étaient du même côté) et si sur un malentendu ta rame s’était pas trouvée entre le rocher et toi, t’étais bon pour pour une greffe de la peau du dos. À part ça, walouh pour l’adrénaline.

Côté bestiole, et bien pendant qu’on tirait les rafts (le quotidien), il y avait à quelques mètres un joli serpent noir, le serpent tigre. Ouais il est rayé en Australie mais comme il fait plus froid en Tasmanie il est tout noir ici. La bestiole est pas agressive, les guides sont pas inquiets. Bon ca va alors. Et le fait que c’est le serpent le troisième plus mortel au monde on en fait quoi? C’est vrai qu’on dort à la belle étoile à même le sol. Laure, rassures toi, pour l’Australie j’ai pris l’option ‘snake free’

C’est plutôt côté santé que ca a merdé grave. En fait plusieurs ont été malades à cause de la flotte mais c’est toi qu’à eu la fève. C’est le genre réveil en urgence à 5h du matin, récupération de la lampe frontale et course vers le groover pour récupérer un petit sac plastique. Déjà que de jour c’est pas facile mais de nuit, imaginez la galère. Et quand tu dois en plus y allait toutes les 20 minutes. Bon ben du coup ton stock de médocs est déjà à sec et tu t’es baladé avec un petit sac plastique dans chaque poche en cas d’urgence. Donc quasiment 5 jours à se traîner de smecta en smecta et surtout prier pour que ça n’arrive pas sur le raft les fois où tu mettais la combinaison.
Et c’est pas tout, complètement coincé du dos, certaines nuits impossible de dormir tellement ca fait mal et comme un con t’as pas voulu emporter la pommade anti inflammatoire. (Trop lourd à transporter, no comment)

Dernier jour de rafting, pas le moindre rapide en vue, on porte même plus les casques. Tu t’es arrangé pour monter sur le raft d’Éric. Du coup, on met la musique. Sur un rocher un serpent tigre roupille…
Trente minutes plus tard on s’arrête pour faire une petite marche dans un ruisseau, un coin qu’ils appellent ‘le monde perdu’. Tous les troncs sont couverts de mousse, l’eau a des reflets cuivrés. Puis tu t’engages entre deux parois avec de l’eau jusqu’aux genoux. Et là tu te te dis que le serpent vu précédemment à peut-être un cousin par alliance qui traîne dans le coin. C’est vrai que t’as jamais demandé aux guides ce qu’ils avaient en cas de morsure. Une bible?
100m de ce couloir pour ressortir dans un coin de verdure. Tu te retournes, personne. Mais ou est passé la 7ème compagnie? Tu peux marcher qu’entre deux parois verticales de 4m de haut, ils sont tombés dans un trou? Tu fais demi tour et reviens aux rafts. Personne à part Jordi et Éric qui roupillent. C’est Abigael qui est tombé sur eux en revenant. Ils s’étaient embarqués sur un chemin invisible avant de s’embarquer dans le couloir. Du coup t’as le temps pour un petit goupillon. Que dal, Abigael sort un pipeau et se met à en jouer, enfin essayer d’en jouer.

Pour les dernières heures, on a attaché les trois rafts ensembles tout en longueur pour aller plus vite. La yoga team est arrivé dans la nuit, faut être motivé pour pagayer de nuit dans le froid et être mouillé.
Le bateau est arrivé le soir avec sa cargaison de bières. Toi avec ton bid, t’as fait l’impasse mais tous les autres se sont jetés dessus. Certains l’ont joué, non nous pas d’alcool mais finalement….
Bon on s’est tapé 5h de bateau pour traverser un lac et récupérer la bagnole à Strahan, un bled au bout du monde. On a pris 6h de tempête, tonnerre compris. A un jour prêt, on se prenait cette flotte sur le raft. Le patron du bateau a du prendre un chemin différent qu’il n’avait pas pris depuis six ans à cause de ce temps pourri. Et arrivé à l’embarcadère au moment de décharger tout le matos, on a pris la grêle, ouais quand ca veut pas.

Incroyable, t’es revenu à Launceston, tu déballes tes fringues et t’as ramené quoi qui se trimballe sur ta polaire?  Une petite sangsue.
Deux prochains jours pour la préparation du fameux trek overland track, lavage de fringues et toutes ces conneries.

Je vous écris d’une laverie automatique ou je viens de m’apercevoir que j’ai fait tourner une machine où il y avait pas mes fringues. Putain, faut pas vieillir!!

Recette (je compte sur vous pour l’essayer et renvoyer une photo)
Un paquet de biscuit (les plus simples)
30-35g de lait concentré
1 citron
1 paquet de noix de coco râpée
100g de sucre glace

Écraser complètement les biscuits pour en faire des miettes
Ajouter de la noix de coco râpée et le lait concentré
Râper le citron en zest
Mélanger le tout
Mettre dans un plat et avec une cuillère compacter la pâte obtenue
Récupérer le jus de citron et mélanger le avec le sucre glace et une cuillère d’eau chaude
Étaler le résultat obtenu sur la pâte précédente puis saupoudrer avec le reste de noix de coco restant
Mettre au frais pendant 1 heure