Direction le canyon de Colca, le 2eme canyon le plus profond du monde mais méfiance, déjà qu’il pipeaute sur leur hauteur de cascade.

Beaucoup d’agences proposent des sorties sur 2 jours où tu dois marcher 3h par jour donc t’as décidé d’y aller en solo. Déjà c’est 6h de bus local de nuit pour rejoindre le village de Cabanaconde. C’est le principal point de départ pour descendre dans le canyon. Tu as plusieurs villages qui sont soit tout au fond du canyon soit à flanc de montagnes, ce qui est certain, c’est que tu vas bouffer du dénivelé. T’as plusieurs points de vue assez impressionnant où tu peux voir le fond du canyon, sa rivière (Chap, il paraît qu’il y a des truites mais des vraies, pas celles lâchées la veille pour les pêcheurs du dimanche. Mais en amont il y a une mine d’or et d’ici 10 ans, y aura plus de poissons… Dépêches toi de venir), sa fameuse oasis de Sangalle avec ces hospedajes avec piscine entourée de gazon coupé au millimètre. Le bleu de la rivière, le vert de l’oasis et différentes couleurs sur les flancs des montagnes, manque plus que le soleil. 

T’es à plus de 3000m d’altitude et t’as plus de 1000m de dénivelé négative sur un chemin dégueulasse, plein de caillasses pour descendre au rond du canyon. Ça beau être une descente assez brutale, tu vas mettre plus de 2h pour descendre au fond du canyon est rejoindre le village de Llahuar. Alors village c’est un bien grand mot. T’as 3 maisons abandonnées et 2 hospedajes avec des bassins d’eau chaude naturelle. Ouais le coin est assez actif et parfois tu peux voir des fumées sortir de la terre avec une bonne odeur d’œuf pourri. T’as un mec qu’a d’abord construit sa piscine et ensuite qui est en train de construire son auberge, il sait attirer le chaland.

Alors, t’es à 9h15 dans le bled, ça va faire long de passer la journée entière dans un bassin en béton d’eau chaude. Donc t’as décidé de remonter un canyon perpendiculaire jusqu’au village de Fure. Remonter, c’est le mot adapté. Tu marches à flanc de montagnes sur des sentiers parfois soutenus par des empilements de pierre. Vu que t’as parfois 100m de vide dessous, t’es content que le chemin soit du made in Inca et pas made in China sinon tu finissais en bas. T’arrives enfin à Fure, une hospedaje avec 6 cabanons et vue imprenable et 20 maisons abandonnées. Depuis le début, t’as croisé 5 touristes mais ici personne. Tiens, du soleil donc tu pousses jusqu’au fond du canyon pour aller à la cascade Huaruro. Trop lent tu es. T’arrives juste quand les nuages sont de retour et t’accueillent avec quelques gouttes de pluie. Retour à Fure où tu t’installes. Ça fait 6h de marche sans la moindre pause, tu décides de rester là pour la nuit. De toute façon t’as pas trop le choix, t’as un chat noir au yeux verts qui est venu squatter tes genoux.

Le gars qui s’occupe de l’hospedaje est un jeune argentin qui vient faire du bénévolat. La vache, perdu au bout du monde…. T’avais lu que certains villages n’avaient pas l’électricité donc t’avais amené ta frontale. Ouais, les infos datent de la guerre de 100 ans. T’es vraiment dans un bled perdu où il n’y a rien et bien ils ont du WiFi. Mais pas d’eau dans la douche. Mais vu la température des quelques gouttes qui sont tombées, t’aurais juste laver entre les doigts de pieds.

Nuit fraîche, tu pars aux aurores. Tu te retapes la redescente et ce coup-ci tu es de l’autre côté du canyon. Tu vois très très haut à flanc de montagne une piste qui t’intrigue. Tu t’aides de maps.me pour trouver le chemin qui y mène, sinon t’es bon pour marcher sur la route. Après 10 minutes d’aller retour, tu trouves enfin le chemin qui monte droit dans un pierrier. Ouais, c’est mieux que la route. T’en chies pour arriver en haut et tu tombes sur une vraie piste. Apparemment le gouvernement péruvien a du commencer à construire cette route puis a laissé tomber. Tu marches sur cette ancienne piste qui est recouverte de broussailles et de là t’as une vue exceptionnelle sur le canyon. En fait t’es 400m au dessus de la route. A un moment maps.me t’indique de prendre le chemin qui redescend vers la route alors que la piste continue. C’est tentant de continuer, au pire tu feras demi tour. A un moment tu surplombes même la fameuse oasis de Sangalle où tu vois le bleu turquoise des piscines.

La piste est coupée par un glissement de terrain. Tu t’approches. T’as 200m de vide en dessous. T’as 95% de chance de finir en bas si tu essayes de passer et t’as oublié ton parachute. La piste n’est indiquée sur aucune carte, personne ne sait que tu es là et t’as peu de chance de croiser quelqu’un. Ça pue. Dégoûté, tu commences à faire demi tour quand tu vois des traces de pompes qui partent sur le côté. En fait, il y a un petit chemin qui permet de contourner l’obstacle. Ça se reproduira plus tard. La piste se transforme en chemin. Alors expliquez moi comment les mecs ont construit une piste carrossable qui commence et se termine par un chemin. Faut ensuite se faufiler entre les broussailles. Finalement, après une petite montée où t’es déchiré de partout t’arrives à un point de vue sur une autre partie du canyon, juste au dessus du village de Malata. T’as souvent douté mais comme t’avais vu des traces de pompes, tu t’étais dit que ça devait bien amener quelque part. Descente en slalomant entre les cactus et les broussailles pour rejoindre le bled.

La civilisation, 2 petites boutiques, une petite place et des gens. Oui car t’as vu aucun habitant dans les 2 villages où t’es passé avant. La dame de la boutique te dit qu’il y a une fête au village de Cabanaconde, celui en haut du canyon d’où t’es parti la veille. C’est la fête de la Vierge de Carmen et c’est le dernier jour. La vache, t’es du mauvais côté du canyon, ça veut dire qu’il faut redescendre tout en bas et se retaper la montée. Direction l’oasis de Sangalle où tu vois des pimpims en train de buller au bord de la piscine. Tentant? Que neni. Il est 11h tu marches depuis 6h30 du matin et t’es face à la montée qui est donnée pour 3h30 de marche. Beaucoup de gens remontent très tôt le matin pour éviter la chaleur. Toi, t’as signé avec l’agence Ricardo travel qui garantie par contrat un temps pourri. Donc t’enquilles direct avec 2 litres de flotte. Putain, ça fait que monter sans faux plat. T’as beau être un ‘i believe I can walk 6000m’, ça casse les pattes. Tu mettras 2h15 pour arriver au sommet sur les rotules avec un procès pour rupture de contrat car t’as chauffé dur dans la montée sans nuage.

Tu files prendre une chambre (et une douche). Toutes les femmes sont en tenue traditionnelle avec leur grande robe et chapeau brodé. Les hommes, eux, portent le chapeau de cow-boy. Plusieurs fanfares jouent dans la rue, manque plus que les majorettes de Bernay.

Puis direction l’arène. Ouais, petit bled mais arène. C’est pas ton truc là boucherie en pleine air mais tu y vas pour voir l’ambiance. Elle est déjà blindée de monde et la bière coule à flots. Tu te débrouilles pour être tout devant, assis au dessus de la porte par où entrent et sortent les taureaux. Vue imprenable. Faut juste bien lever les jambes quand les bestiaux passent. T’as une demi douzaine de toréadors dont une guest star mexicaine, un ancien de chez Charral. Mais t’as aussi 4 bouffons déguisés. Premier taureau qui rentre dans l’arène. Les bouffons essayent de l’exciter avec leur cape. Ahah, que dal, le taureau a peur et fuit. Au bout de 5 minutes, un mec choppe le taureau au lasso et ils essayent de le faire sortir. C’est là le plus marrant, le taureau refuse de passer la porte. Toi t’es juste au dessus et tu pries pour pas tomber. Un des bouffons donne un coup de pied au cul du taureau pour le faire avancer. Le taureau lui répond par un coup de sabot dans les parties. Taureau 1, bouffon 0. Madame bouffon va dormir tranquillement ce soir.

Les dix premiers taureaux seront du même acabit, refusant de jouer le jeu. Parfois un vrai toréador, ceux en moule burnes et paillettes, tente de toréer mais revient dégoûter. Donc un peu chiant mais le truc marrant est là sortie du taureau où quand les bouffons font le show.

Finalement un vrai taureau qui en veut rentre sur scène toutes cornes dehors. Lui, il accepte la muleta. Du coup la gueststar, toute paillettes dehors, vient le toréer. Un coup de cape à gauche puis à droite sous les vivants de la foule. Ah, il est fier le gars. Puis les fanfares s’arrêtent et vient le moment de la mise à mort. Le charlot essayera à 4 reprises de planter l’épée. Une vraie boucherie. Il va se faire huer, siffler avec du ‘mexicain rentre chez toi’.

Finalement, le taureau qui pisse le sang en a marre et s’assoit. Un toréador récupère une pointe pour essayer de la planter à l’arrière du crâne du taureau. 6 fois avant d’y arriver. Une boucherie…

Quand un toréador fait un super ‘combat’, il peut avoir en trophée la queue et les oreilles du taureau. Dans ce cas, tu l’aurais bien vu repartir, ce boucher, sans ses oreilles et sa…

Ils font rentrer un 2eme taureau avant d’avoir fait sortir le mort. L’autre, pas con, a vu son cousin germain sur le carreau, et a pas trop envie de terminer sur l’étal du boucher. Du coup, il a joué petit bras, a fait 3 tours d’arènes, et a refusé de s’approcher des capes pour ressortir vivant de ce piège à con. Allez c’est suffisant, cassos. 

Le soir au resto, les toréadors sont à la table d’à côté, ça t’a démangé de leur demander s’ils avaient commander du taureau.

Le soir, sur la place principale, les fanfares rivalisent pour attirer les gens qui viennent danser en tournant en rond. T’as l’oreille musicale d’une chèvre mais t’as l’impression qu’ils jouent la même musique depuis 2 heures. Puis vient l’heure du feu d’artifices. Ils ont monté tout un échafaudage rempli de pétard et feu d’artifices qu’ils allument au fur et à mesure. C’est super dangereux car on est juste à côté et parfois de fusées partent dans la foule. Ton voisin c’est pris un truc dans le crâne. En France, il y aurait déjà eu procès, ici… Ensuite, il y a 2 concerts sur la place mais t’es tellement crevé que t’as jeter l’éponge.

Lendemain retour à Arequipa puis, pour la première fois, un avion pour aller à Cusco. Ouais, tu voulais voir un peu le Pérou vu de haut.

Ricardo, boucher par procuration