Hola tchamo,

C’est comme ça qu’on interpelle qqun dans ce pays.

Imaginez une grande plaine vallonnée herbeuse à perte de vue et au milieu des plateaux avec des parois verticales de 1500 à 2000 m de haut. Ce sont les fameux tepuy vénézuéliens. La plupart sont accessibles uniquement en hélicoptère, le plus connu grâce au livre de Conan Doyle ‘le monde perdu’ (le début est un peu chiant mais va vous donnera une idée) s’appelle le Roraima. On a prévu 5 jours aller-retour pour y monter. Sur la route, on s’arrête et on croise un groupe de français qui en revient. Tu les vois sortir de leur bagnole, on dirait des zombies. Ils ont les jambes couvertes entièrement de gros boutons rouges. En comparaison tes piqûres de tiques c’est de la rigolade. Ouais, où on va, c’est le terrain de chasse de puri-puri, des mini mouches extrêmement agressives. Apparemment ils ont pris cher. Ils ont pris de la flotte et en plus certains ont choppé la tourista. Ils vont s’en rappeler du Roraima. Ca promet. Surtout qu’on est court anti-moustiques (toi t’en a plus).

Ici on est chez les indiens Pemons. Ton top gun de guide dit que tout est super organisé par une pointure de chez pointure. C’est clair, on en doute pas. Il y a un autre groupe de 45 vénézuéliens qui partent le même jour que nous, et pas des pros de la montagne. S’ils le font c’est que c’est vraiment une balade. Donc pour être sûr qu’on a une bonne place au prochain camp à la Tek river, ils font partir un porteur à 3h du matin avec nos tentes pour arriver en premier et les installer aux endroits stratégiques. Top! On a confiance!

J1 : Départ à 8h, 30 minutes en avance, première fois depuis le début, on en revient pas, il va se passer un quelque chose. Comme miaou se traîne, il nous indique le chemin pour qu’on y aille à notre rythme. Résultat on arrive au camp à 11h. La journée est finie. Putain on avait demandé à faire des longues journées de marche, et on va se traîner 3h par jour.

Au fait, bizarre il y aucune tente mais il y a un autre guide de notre agence. Le mec est venu avec un groupe sans prévenir qu’il avait un problème au genou. Résultat au bout d’une journée, il peut plus marcher. Son groupe est parti sans lui avec le guide pemon et les porteurs. Il nous dit qu’on peut aller à la rivière car à cette heure il y a pas bestioles. Mouais, on s’est approché et on a fait demi-tour. Que des pointures, je vous ai dit. Miaou est arrivé 30 minutes plus tard le porteur avec les tentes 1h après. Si vraiment le mec est parti à 3h du matin, il a du faire des pauses. Après-midi à buller et à se battre avec les puri-puri. Il fait chaud, t’es en pantalon long, chemise manches longues, chaussures et sac plastique autour des chevilles pour éviter de te faire piquer à travers les chaussettes. On se fout de ta gueule mais au moins t’es couvert.

J2 : On est réveillé à 5h30 par les autres groupes. On doit libérer nos tentes à 7h pour qu’un mec puisse, comme la veille, les monter au prochain camp. Ouais, bien sûr! ! On doit traverser une rivière et il faut attendre le guide car lui seul connaît l’endroit le moins dangereux. Et le voilà qu’il traverse sans nous attendre (il a deux bâtons de marche pour s’aider, les autres ont en un chacun et toi t’en a pas car tu leur as filé les tiens). Il y a 20m à traverser et un putain de courant. Le guide se fait même aider par un local pour finir la traversée. Toi tu peux pas marcher sur les rochers car t’as rien pour résister au courant donc tu descends entre les rochers et tu sers de tes mains pour pas te faire embarquer par le courant. Les autres se sont arrêtés, ils vont pas y aller. Tu finis de traverser alors que le guide a tranquillement posé son sac et est revenu sur un rocher pour indiquer aux autres, à distance bien sûr, ce qu’il faut faire. De l’autre côté c’est clair qu’ils passeront jamais tout seul et le guide bougera pas. Donc tu poses ton sac et tu y retournes. Et dire qu’au début du voyage la règle était chacun pour soit… 20 minutes pour faire 20m et à la fin tu te fais engueuler par le guide car tu les as pas fait passer par le bon endroit. Tu lui dis que lui il est resté sur son rocher au lieu de venir aider. Mais pas du tout, si tu y étais pas allé, il y serait allé bien sûr. On verra au retour.

2h de marche pour se taper 800m de dénivelé et atteindre le camp de base. Les tentes n’y sont pas, bien sûr. Il est 10h30, la journée va être longue surtout qu’il y aucun endroit pour se balader… Le guide arrive une heure plus tard et les porteurs 2h encore plus tard avec les tentes. Le guide nous avait promis que sur le Roraima, ça allé être la fête au niveau de la bouffe, on va dire que c’est bon mais frugal. Bon ben on se fait un peu chier du coup on apprend le Uno à un des porteurs. On s’occupe comme on peut.

Comme il y a beaucoup de brouillard en haut des tepuy, de grandes chutes se forment temporairement. Les rares moments où il y a pas de brouillard, c’est très joli. Pour l’instant on a du soleil alors qu’on aurait du prendre de la flotte. Le groupe de 45 vénézuéliens arrivent vers 16h, harassé. C’est vrai qu’ils portent tout, eux. Dîner à 19h, coucher à 20h, c’est la fête!

J3 : Nuit difficile, il a plu et tes voisins de tente ont discuté de minuit à 1h. Manquerait plus que l’appel du muezzin à 5h du matin. On a que 2,5 km à faire mais très pentu et miaou veut que tu l’attendent à un endroit soit disant dangereux. Ca commence par un chemin très pentu sur du kaolin, ensuite tu marches dans le lit d’un ruisseau. Arrivé au soit disant endroit dangereux, on doit passer sous une cascade et il faut juste rester près de la paroi. On attend miaou 30 minute non pas parce qu’il est lent mais parce qu’il discute sans arrêt avec ceux qui redescendent. Il est incapable de rester 5 minutes sans parler, on en peut plus. En attendant qu’il arrive on a vu au moins 40 personnes descendre et il y a aucune difficulté. Il arrive, nous dit de bien rester près de la paroi et on peut y aller. Putain, 30 minutes plus tard on est sur le plateau. On a mis 2h au lieu des soit disant 4h.

Maintenant faut trouver un hôtel pour s’installer. Ouais, t’as pris un circuit luxe, ici les campements dans les rochers s’appellent des hôtels. Il y a une dizaine d’hôtels et tout le monde n’en aura pas. Les 45 vénézuéliens vont être dans la merde. On en trouve un, le Basilio. Bien sûr, un porteur aurait dû arriver avant pour réserver. Mais finalement comme on va super vite, c’est nous qui réservons. Alors le campement Basilio est assez étroit mais s’il pleut on devrait être protégé de la pluie.

Le Roraima est une sorte de plateau (dans sa longueur il fait près de 30 km de long) au milieu de la savane. Une grande partie de sa végétation est endémique, il y a encore des insectes qui n’ont pas été répertoriés. C’est très rocailleux et très noir, t’as parfois l’impression de marcher sur de la lave même si c’en est pas. On avait peur que le guide veuille rester au camp l’après-midi mais on va aller voir les hots spots du coin. D’abord un endroit plein de cristaux, y en a partout. Miaou a expliqué la raison de leur provenance mais t’étais en mode off. Il y a aussi les jacuzzis. Des piscines naturelles de roche orangée avec au fond des cristaux. Ca fait de très jolies couleurs quand il y a le soleil. Le problème est que le soleil joue avec nous et qu’il est rarement à l’endroit où on arrive.

On s’approche du bord du plateau. Il y a un éperon rocheux où tu peux aller. En dessous tu as 700m de vide. Malheureusement on n’y est pas au bon moment car on est dans les nuages. Gabriel veut y aller. Le guide lui montre le chemin. Faut pas se rater car à 1,5m du chemin tu fais du base jump. La roche est mouillée. Gabriel s’avance… et glisse. Où il est tombé il y avait peu de risque mais quand même. Il revient vers nous, penaud. Ces jambes sont prises de tremblements. Toi avec ton vertige même pas en rêve surtout avec ce qui a failli lui arriver.

Dernier hot spot, le plus haut point du Roraima. De là tu sautes d’un rocher et en photo tu as l’impression de sauter dans le vide. On s’amuse comme on peut…

Retour à l’hôtel, on voit les vénézuéliens arrivaient. Ils cherchent des endroits pour s’installer. Ils vont devoir s’installer dans une petite plaine. S’il pleut, ils vont en chier. Miaou est mort. Demain on est sensé aller au triple point. C’est l’intersection entre le Venezuela, le Guyana et le Brésil. En 3 pas tu passes dans 3 pays. Il y a 7-8h de marche aller-retour. Miaou nous dit qu’il n’ira pas. C’est notre chef porteur, Alexander, qui viendra. Ca rigole plus, le mec a 23 ans, et c’est le champion de la course des 100km en montagne ici. A ce propos, un petit mot sur nos porteurs. Ils sont 4. Ils portent des longs et étroits paniers dans leur dos pour porter nos sacs, tentes, bouffe, bonbonne de gaz et même chaises pliantes. T’as essayé de porter leur panier. Au bout de 2m sur du plat, t’as les épaules cisaillées par leurs lanières en osier. Ils portent ça pendant des heures en montée et en plus à l’arrivée ils doivent monter les tentes et préparer les repas. Grand respect!!!

Dîner à 19h. Miaou n’arrête pas de parler et surtout il parle très fort. T’as sorti le saucisson (merci Guy) et on a une bouteille de vin rouge chilien pas mauvais. Miaou se tait uniquement au moment où il se couche, 30 secondes après il ronfle. Que veux tu faire…

J4 : Nuit difficile. Il a plu toute la nuit. L’eau tombait en cascade sur un rocher à côté de ta tente. T’avais l’impression qu’un mec avait passé la nuit à pisser à côté de ta tente. Rajoutes à ça le ronflement de miaou et t’as l’image d’une belle nuit. Lever à 6h. On est dans les nuages, il pleut, il fait froid. Kinnary a choppé la tourista. Elle a été malade toute la nuit. Le guide en profite pour dire que c’est peut-être parce qu’elle a marché trop vite dans la montée. T’as raison mon gars, elle court du 100km alors ta balade de charlot. Bon ben y a plus qu’à attendre. T’es dans ta tente avec la musique pour ne pas entendre miaou bavasser .

7h, il y a des petits oiseaux, miaou en déduit que le temps va bientôt se dégager.

9h le temps est toujours aussi pourri. Trop fort ce guide. Il te propose néanmoins d’y aller. Il s’en fout lui, c’est Alexander qui ira. Kinnary est HS, vu le temps, Gabriel n’est pas motivé donc t’y vas seul. En théorie c’est 8h aller-retour, miaou pense qu’on le fera en 7h alors on part avec des lampes au cas où et de la bouffe. Alexander est en croc chaussettes, soit disant c’est le mieux pour marcher sous la pluie. Le mec est parti comme une fusée, toi t’essayes désespérément de le suivre, au bout de 100m t’es essoufflé. En plus, il a vu qu’un autre groupe y aller aussi et il a voulu les taper rapidement. Ben ouais, c’est le champion de la région, il a une réputation à tenir et toi t’en baves. Les mecs ont vu passer une fusée et un baltringue qui essayait désespérément de rester dans son sillage.

Comme il a énormément plut, il y a des mares partout. Au début t’essayes de les éviter mais à un moment t’as 20 cm de flotte et même de l’eau jusqu’en haut des cuisses. Le chemin se transforme parfois en cascade. A partir de ce moment, vu que tu as 1 litre de flotte dans chaque pompe, tu vas tout droit. Alors le paysage? Difficile à décrire vu que t’es concentré sur où tu poses tes pieds pour pas te vautrer. C’est pas compliqué, tu mets un pied à côté du chemin t’es sur le cul. On est passé par la vallée des cristaux. En fait c’est un petit canyon avec des cristaux blancs et transparents partout. Ça doit être très joli avec du soleil…

On est arrivé au triple point en 2h15. 30 minutes de légère éclairci (je n’ai pas dit soleil) le temps de grignoter qqchose et on est reparti. 30 minutes plus tard on croisait l’autre groupe qui était en train d’arriver. Leurs deux porteurs étaient frigorifiés, ils avaient juste un t-shirt et un sac poubelle pour se protéger du froid et de la pluie. Vu leur vitesse ils ont du rentrer à la nuit. On a été sympa, on leur a dit d’éviter le chemin par lequel on était venu pour ne pas se retrouver dans 1m de flotte. Retour en 2h10, complètement mort (toi, pas lui). Quand il croisait d’autres porteurs, il leur disait le temps qu’il avait mis. C’est pas tous les jours qu’il peut y aller avec des touristiques à ce rythme. Toi, t’es allé directement faire une sieste. Lui il est parti chercher 20 litres d’eau et commencer à préparer le dîner. No comment.

J5 : C’est le jour de la descente, le temps est pourri. C’est au tour de Gabriel d’être malade, il a vomi toute la nuit. Tu laisses les autres redescendre avec le guide. Tu pars 2h plus tard avec les porteurs histoire de ne pas avoir à les attendre trop longtemps en bas. Il y a du brouillard partout, un groupe est totalement perdu et ne trouve pas le chemin de la descente. Sans le porteur qui connaît le chemin impossible de savoir comment redescendre.

Apparemment le guide s’est vautré trois fois dans la descente. Vu la flotte qui est tombée impossible de traverser la rivière à pied. Ils nous font passer un par un allongé dans un canoë. Miaou n’aura pas à nous aider, dommage. Fin d’après-midi, tu fais décoller ton drone histoire de faire un petit film. Gros coup de vent, il est emporté au loin, très loin. 1/2h de recherche dans l’herbe avec 3 des porteurs. Bon, ben en dehors de la soirée photos de 4h, vous échappez à la séance cinéma.

J6 : Lever à 5h car on a 3h de marche pour récupérer la bagnole et ensuite on va se la péter avec notre avion privatisé. Kinnary est à nouveau malade.

Ahlala ces touristes petite nature…

A ton arrivé, le chauffeur de la bagnole qui doit nous emmener à l’aéroport te propose une bière fraiche. Euh il est 9h du matin… 2 minutes après être de retour au bureau des guides, tout le monde savait le temps qu’on avait mis pour aller au triple point. Une légende le ricardo. Tu reviens l’année prochaine, il y aura une plaque en bronze avec le temps de la dream team.

Prochaine étape les chutes de Salto Angel mais auparavant il faut prendre un petit avion.

Speedy ricardo