Yo,
Après maintes recherches et moyennant un prix exorbitant pour le pays, t’as trouvé un trek de 3 jours dans la jungle de Mondulkiri. C’est un australien qui t’avait loué la veille un scooter sans frein qui te l’organise. T’as trouvé personne pour t’accompagner. Tous préfèrent le trek de 2 jours voir 1 jour. Le seul problème, t’es sur les genoux. T’as du bouffer un truc qui passe pas, t’as la tourista et une belle… Toi qui a dit à l’australien que tu voulais pas un trek de charlot… Du coup, t’as doublé ta provision de PQ. C’est à se demander si sur ces 6 derniers mois, t’as pas eu une merde sur chaque trek, genou, talon, fièvre, mollet…
Il faut d’abord aller chercher le guide dans le petit village de l’ethnie Bunong de Putang, point de départ de ces treks à la journée. Un monde. En 20 minutes t’as du voir partir 3 groupes de 10 sur le même chemin. L’australien te dit que le soir qu’il y a parfois plus de touristes dans les homestay du village qu’en ville. Top le dépaysement.
Faut attendre le guide Mister Wing qui est allé déposer maman au champs pendant que lui va partir en vadrouille avec toi.
Puis on se tape 40 minutes de bagnole pour rejoindre le début de la jungle. Mister Wing la  connaît comme sa poche, il s’y est caché avec ses parents à l’époque des khmers rouges.
On s’est reparti la bouffe et c’est parti. Premier stop pour ramasser une écorce qui est sensée soigner ton mal de ventre. Tu l’as mâchouillée, c’est dégueulasse et résultat pas probant les jours suivants. Vaut mieux rester à ces bons produits chimiques que nous fourguent à la pelle les gentils labos pharmaceutiques.
Au début on croise quelques campements très basiques mais ils ont le super téléphone à la main. Ils vont dans la jungle en moto mais vu le terrain ils ont inventé le ‘pneu jungle’. Nous on a bien les pneus neige. Ils ont entouré le pneu avant avec de la chaîne de vélo. Et tu vas découvrir qu’en fait ils vont dans la jungle couper des arbres, les débiter en planches. Et tout ça de manière illégale. La moto a remplacé l’éléphant pour le transport des planches. Il y a parfois des petits chemins avec au milieu la trace de pneu des motos et tous mènent à des sites de coupe. Il y en a beaucoup et sur certains restent encore les planches qu’ils ont pas encore ramenés.

Et tu retrouves malheureusement des déchets plastiques. Voyons le côté positif, mister Wing a passé son temps à se frayer un chemin au milieu de la jungle donc pas trop de plastiques. Il t’a montré des collets pour chopper des singes avec un bout de banane comme appât.

Ouais, autant à quelques kilomètres les éléphants sont traités comme des rois autant ici le singe doit se la jouer discret car il peut rapidement finir dans la casserole. Donc t’en auras aperçu qquns mais très peu de temps. La bestiole ne s’éternise pas. Ah, tiens, le bruit au loin d’une tronçonneuse, encore un arbre de moins.
Le trek a surtout consisté à aller de cascade  en cascade tout en traversant la jungle. L’eau est fraîche mais les chutes sont superbes. T’es en sandales (ouais en sandales mais avec du sparadrap partout) donc tu fais gaffe où tu mets tes pieds, tu te traînes derrière mister wing vu ta tourista et t’es à la limite de t’endormir à chaque pause.

Sur un spot abandonné de coupes de bois, mister wing a retrouvé un réchaud et un fusil. Alors faut voir le fusil fait maison. Un bout de bois avec un petit tube en acier à l’intérieur. Une pompe à vélo pour comprimer de l’air dans un bidon en acier fixé sous la crosse. Un petit caillou comme balle et mister wing n’a pas touché ta casquette à 4m de distance.
Mister wing a tout embarqué tout content et du coup t’as un peu eu l’impression qu’il faisait parfois le tour de sites abandonnés, histoire de voir s’il y avait rien à récupérer. Il y a des énormes bambous partout et même si la végétation est pas super dense, le soleil a dû mal à percer. Premier camp au bord de la rivière. Tu somnoles pendant que mister wing cuit du riz, ah ça faisait longtemps, dans du bambou. Il pose aussi un filet dans la rivière qu’il ira ramasser le lendemain matin pendant que tu dors encore.
Installation du hamac, 17h30 le dîner est plié et t’es couché…
T’as traîné dans pas mal de jungles que tu trouvais assez silencieuses le soir et ici c’est le festival de la grenouille. Ça coasse à tout va. T’as aussi la cigale locale. Si sur certaines vidéos vous entendez en fond sonore un bruit strident, non, c’est pas pas une scie circulaire mais c’est la cigale locale.

Le lendemain matin, la quinzaine de poissons chopés dans le filet étaient écaillés, cuits en brochette. Tu te te régalais à l’avance. Que dal, il les a fait cuire sans les vider, un goût dégueulasse. Dommage.

Côté bid, ça va pas mieux. On est reparti en ballade alternant des petits chemins et des ouvertures de chemin au coupe coupe pour arriver à chaque fois à une petite cascade.
C’est con, mais autant il y a 2 jours t’es allé en scooter voir la cascade de Bousra et même si elle est très grande et jolie, tu te retrouves au milieu de plein de petites échoppes et blindée de monde et du coup bof, autant (ouais la phrase est super longue) ici les cascades sont moins imposantes mais tu les trouves plus jolies car elles se méritent ne serait-ce que se taper des heures de marche dans la jungle.
Plus ça va, plus on a accès facilement à tous les sites. Il y a 10 ans, t’es allé voir ‘el mirador’, une des dernières pyramides maya découvertes au nord du Guatemala. 2 jours de marche dans la jungle sur des chemins boueux. Un vrai plaisir quand tu y arrives enfin. Pour toi, ça donne de la valeur au site. Maintenant, tu peux, peut être, y aller en bus rempli de chinois..
Ouais, c’était le paragraphe ‘philosophie à 10 balles’ écrit dans ton hamac moustiquarisé (oui c’est plus joli qu’avec moustiquaire).
Alors côté bestioles, rien d’innovant, on reste dans le classique de la jungle, sangsues, serpents, saloperies de fourmis qui piquent, moustiques par millier, et autres insectes qui te considèrent comme leur repas livré à domicile, un peu le delivroo local mais c’est toi le plat. Si t’as pas ton anti-moustiques, les journées doivent te paraître longues et démangaisantes (encore un nouveau mot)
Bon, t’écris, t’écris mais il est déjà 19h. Il faut aller dormir (ou du moins essayer)

7h, mister wing est déjà levé depuis longtemps, il a choppé et fait cuire 2 grenouilles. Elles auraient dû fermer leur gueule cette nuit. Ici, il faut être discret sinon tu finis en brochette. Et les cigales qui font un bruit pas possible, elles devraient la jouer discrète car ici la cigale tu la manges grillée en apéro.

Pour ce dernier jour on va sortit de la jungle et bien sûr, coup de chance il pleut. Toi, optimiste, t’étais parti du principe qu’il pleuvrait pas afin de limiter le matos à porter.
T’etrennes tes chaussures achetées à Singapour. 5 minutes de marche et t’as compris qu’elles étaient pas faites pour les rochers humides et elle sont pas imperméables non plus. Donc la chaussure idéale pour ici. T’en as essayé des pompes de marche et bien les seules qui tiennent sur terrain glissant, ce sont celles qui ont des semelles vibram et c’est pas pour faire de la pub.
Petite devinette. Si on fait l’addition de jungle plus pluie, on obtient quoi ? Le festival des sangsues
On a des bâches qui nous servent de kway et nous voila répartis dans la jungle. Et quand on doit grimper une colline, c’est au coupe coupe et en ligne droite sans le moindre petit virage de récupération.
Dès que tu sors de la jungle t’es dans un vent glacial. Du coup on oublie les autres cascades et direction le village Putang de mister wing. On croise un groupe de 15 touristes qui sont venus faire une marche à la journée, un peu surpris de voir débarquer 2 charlots couverts de boue une pétoire à la main. Bonne ballade à eux sous la pluie.

Ton objectif, revenir rapidement en ville prendre une bonne douche chaude pour te réchauffer. Après 5h de marche sous la pluie, on revient au village de mister wing. Sincèrement, sa maison ressemble presque à un taudis mais garé derrière il a son 4*4 Mitsubishi… Va comprendre

Ça y est t’es à ta guesthouse, tu vas enfin réchauffer tes vieux os. Putain pas d’eau chaude alors que t’en as eu à chaque fois. Et ouais, soit disant ils ont des panneaux solaires pour l’eau chaude et comme il fait un temps de merde…

Comme quoi, le titre du blog ‘les galères de Ricardo Jones’ est plutôt bien choisi.

Jungle Ricardo

Ps: comment se faire entuber par Apple, Samsung et compagnies…. T’es dans la jungle avec mister wing. Tu as le même opérateur que lui avec une carte Sim locale. Il a un téléphone de base quasiment en plastique qu’un gamin européen de 10 ans te renverrait à la gueule. Et bien lui il capte, toi que dal de chez que dal. On a bien raison d’acheter des téléphones à plus de 1000 euros…..