(toutes les vidéos sont à la fin du post)
Alors, Santiago du Chili, sa place centrale, ses petites ruelles, son église… Non, c’est une blague.
On recommence, Santiago du Chili, ses stations de métros en feu, son couvre feu, ses manifestations qui dégénèrent…
Et ouais t’arrives juste au moment où ça part en vrille. T’as raté de peu les émeutes en Equateur, les blocages des mineurs boliviens, mais coté Chili t’as joué le bon timing.
La raison de cette légère animation chilienne ? Le ticket de métro est passé de 800 à 830 pesos soit 4 centimes d’euros. Imaginez s’ils se prenaient les mêmes augmentations qu’on prend en France. Alors, quand tu dis que tu arrives, faudrait plutôt dire que t’essayes d’arriver. L’avion pour Santiago est retardé de plusieurs heures.
Arrivé finalement à 21h à l’aéroport. En survolant la banlieue de la ville, tu vois quasiment aucun phare de bagnoles sur les routes. Première étape, le passage de douane. Une queue sans fin. Plus d’une heure pour avoir le tampon. Le tapis roulant qui affiche pourtant ton vol ne délivre aucun des bagages de ton vol. Tu laisses faire les chiliens du même vol qui, excédés, passent derrière les tapis et déclenchent les alarmes. Toujours pas de bagages et ton vol n’apparaît même plus au dessus du tapis. T’as des dizaines de bagages abandonnés, un merdier. Apparemment il n’y a personne de la compagnie présent pour sortir les bagages des containers. 1h plus tard, on attend toujours. T’as un mec d’un autre vol mais de la même compagnie qui attend ses bagages depuis 17h et il est 23h. Les gus des autres compagnies n’ont pas le droit de décharger les bagages des autres compagnies. On est à la limite d’y aller nous même. Attente. Des gens applaudissent. Oui, ce sont nos bagages qui arrivent enfin. 
Seul point positif, l’immense queue de 300 personnes qui attendaient pour le check des bagages s’est transformée en une petite file de 10 personnes.
Juste après, t’as 2 queues pour les compagnies de taxi. Pas con, tu vas à la plus courte, juste 20 personnes. Au guichet, on te dit 2h d’attente. Putain, tu t’es levés ce matin à 3h, ça commence à faire long.
T’es enfin dehors, dans la queue pour les taxis. Vu le bordel, les rares taxis font le prix qu’ils veulent. Tu te démerdes pour monter avec 3 autres touristes pour un prix certainement double du prix normal mais c’est pas grave. Direction le centre ville. C’est impressionnant de voir une autoroute vide de bagnoles. Le couvre feu est appliqué à partir de 19h jusqu’à 6h demain matin. A l’aéroport, on t’a filé un papier qui t’autorise à circuler en cas de contrôle. Le centre ville est vide, pas un chat dans la rue et étonnement pas de militaires ou de policiers. Minuit, t’es enfin dans ta chambre.
Lundi matin. Tu t’attendais à voir personne dans les rues mais non, plein de gens, de bagnoles, de bus. Malgré cela, la plupart des magasins sont fermés par précaution. Beaucoup de tags sur les murs en particulier sur celles des banques.
T’es passé par la fameuse Plaza Italia où se déroule le gros des manifestations. Des militaires partout, des arrêts de bus brûlés et même si c’est, à cette heure, c’est très calme. Mais t’as fermé la fenêtre du taxi tellement ça sent le gaz lacrimo.
T’es allé dans un mall en dehors de la ville pour acheter du matos décathlon sauf que tout est fermé sauf le supermarché. L’armée a sécurisé l’endroit car il y a déjà eu des pillages dans d’autres supermarchés. Des centaines de chiliens arrivent pour remplir leur caddie. 200m de queue juste pour rentrer dans le supermarché. Pire qu’un samedi après midi dans un Auchan en France et c’est pareil pour tous les magasins de bouffe.

Il y a 15 ans, t’étais passé à Santiago. Le plus grand musée d’art précolombien du monde était fermé car c’était le week-end de pâques. Cette fois ci, c’est à cause des manifestations. Ça doit être un signe.  La place principale est surveillée par des militaires à cheval. Même les chevaux ont des ‘casques’ et gilet par balles.

Vers midi, l’ambiance commence à changer, les rares boutiques ouvertes commencent à fermer et à protéger au maximum leur devanture. Certaines rues sont bloquées par les militaires. Aujourd’hui les étudiants et lycéens ont décidé de se joindre aux manifestations. Ca va ambiancer.
La plaza Italia où est le cœur des manifestations est à 500m. T’as décidé d’aller voir comment ça se passe. La vache, t’as des mecs qui se baladent avec des pelles. Pour ceux qui ont vu Bernie… T’as des rues ou des gens chantent et manifestent tranquillement en tapant sur leur casserole. Oui, ça date de l’époque des manifs anti Pinochet. Et t’as une grand artère où l’ambiance n’est pas vraiment la même. Alors, on t’a rien dit à toi. On t’a pas prévenu qu’il fallait venir avec un masque à gaz ou au moins un foulard, des lunettes de ski, un casque ou même simplement de l’eau. T’es venu en touriste baltringue de première, les mains dans les poches.
Alors, voilà comment ça se passe, le jeu du chat et de la souris chilien :
Les militaires tiennent certains points et sont dans d’énormes camions et jeep grillagés. Les camions balancent d’énormes jets d’eau pour faire reculer les manifestants les plus agressifs. Les militaires à pied tirent des projectiles de gaz lacrimo et des balles en caoutchouc quand ils sont énervés. De l’autre côté, t’as le premier front, ceux qui balancent des pierres et construisent des barricades, le 2ème front, ceux qui transportent de l’eau avec du bicarbonate de soude pour soulager les yeux de ceux qui se sont fait gazer et le 10ème front, ceux qui mangent tranquillement une glace allongés dans le parc à 100m.
Toi, t’es entre le 1er et le 2ème front. Tu t’es fait gazer plein de fois et t’as pleuré et cracher tout ce que t’as pu. Mais le gaz semble moins fort que celui des israéliens en Palestine. Oui t’as une échelle de valeur sur le gaz lacrimo…
Les mecs arrivent à casser le bitume pour en arracher des pierres et les balancer sur les militaires. Ils ont provoqué des feux un peu partout et si un magasin est mal protégé tout son mobilier sert à entretenir le feu. C’est JC Decaux qui va être content, toutes ses encadrements publicitaires sont explosés.
Les manifestants harcèlent les militaires jusqu’au moment où ceux-ci décident d’intervenir et à ce moment tout le monde décampe. Puis les gens reviennent. Si les jeeps reculent, c’est l’euphorie et les gens les poursuivent mais ils suffit qu’elles s’arrêtent et reviennent pour que tout le monde court dans l’autre sens. Et là, il faut faire super gaffe car on peut se faire écraser par des mouvements de masse. Les affrontements se déplacent en fonction d’où sont les militaires. Mais à un moment, y en avait 5 coincés dans un coin, ils auraient pu se faire démonter par la foule mais ils ont pas été agressés. Ca veut pas dire non plus que ce sont des tendres coté manifestants car faut les voir arracher des barrières, les bancs pour construire des barrières, casser et piller des devantures. Des que les militaires tirent, les manifestants crient ‘militaires assassins’. et dire qu’il y a 2 jours t’étais à bikini land…
Tiens, un hélicoptère survol la zone de conflit. Tiens, un gilet jaune en vélo, qu’est ce qu’il fout ici celui-là, on est pas samedi.
Les militaires balancent des projectiles lacrimo. Les manifestants leurs renvois. On pleure. On court quand ils font signe de venir sur nous. T’as bien dû jouer à ce jeu pendant 2h. A un moment les militaires arrivent pour dégager une barricade. Tout le monde s’enfuit. Ils tirent dans le tas.

T’as pris un projectile (balle en caoutchouc ?) dans le dos. Vu la douleur, tu comprends que certains y perdent un œil. Allez, finalement, une boisson fraîche dans le parc en écoutant de loin les détonations, c’est pas si mal…
T’as discuté avec un chilien pour essayer de comprendre pourquoi les militaires et les manifestants se battent pour une rue. En fait, c’est la rue principale de Santiago qui mène à la fameuse place Italia. Les manifestants défilent et s’y installent en début d’après midi et les militaires la reprennent ensuite. C’est purement symbolique.
Ta pause dans le parc a assez duré, t’as décidé de retourner au show son et lumière mais cette fois du coté militaire. Car, en fait, les militaires font face face aux manifestant d’un coté mais de l’autre coté, personne ne vient les provoquer. Il suffit que tu t’approches sans signe agressif et après tu peux rester. Faut juste faire attention à ne pas s’approcher trop prêt pour ne pas prendre une pierre lancée par les manifestants de l’autre coté. Il a des femmes parmi les militaires et certaines se sont maquillées pour l’action. Surprenant de voir un rouge à lèvres rouge vif sur une militaire casquée et armée. 
Les militaires s’attaquent maintenant à reprendre la place Italia. Il y a 2h, il y avait certainement 100.000 personnes, maintenant il reste surtout les premières lignes qui reculent.
 19h30, t’es de retour à ton appart hôtel qui est au centre ville. Tu ressors à 20h, une ambiance d’un autre monde : La nuit est en train de tomber, quasiment personne dans la rue, pas une bagnole, pas un magasin d’ouvert. Des dizaines de personnes aux fenêtres de leur appart en train de taper sur des casseroles. Toi, primaire, tu cherches de la bouffe. Tu vois 10 personnes qui font la queue devant une grille d’une épicerie. Tu te mets dans la queue. Au loin,  des gens qui courent dans ta direction. Ca pue. Dans la pénombre, se dessinent des silhouettes armées et casquées qui marchent dans ta direction. Le bruit sur les casseroles est de plus en plus fort et résonne dans la rue. Les militaires sont à moins de 100m. Ils patrouillent pour faire appliquer le couvre feu. Les mecs de l’épicerie préfèrent fermer définitivement leur grille. Tu décampent en direction de l’entrée de ton hôtel. La dizaine de militaires s’arrête au croisement. La symphonie de casseroles en mi majeur est incroyable.
Les militaires attendent. Le concert monte en intensité. Un camion blindé arrive et embarque les militaires. Une heure plus tard, les casseroles sont retournées dans leur cuisine respective. .
Dommage que ta fenêtre donne pas dans la rue, sinon t’aurais participé au concert. 
22h, des détonations. Des gars qui bravent le couvre feu?
 
Ricardo good timing

 

Ca commence tranquille….

Coté manifestants

Coté militaire